The weekly Thibodaux sentinel and journal of the 8th Senatorial District. [volume], November 20, 1897, French, Image 1

About The weekly Thibodaux sentinel and journal of the 8th Senatorial District. [volume] (Thibodaux, Lna. [i.e. La.]) 1875-1898

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4
La keiitiiielie de Tàibodaux.
JOURNAL Dü 9 ME DISTRICT SENATORIAL.
JOURNAL OFFICIEL DE LA PAROISSE LAFOURCHE ET GARDIEN DES INTERETS DE LA VILLE.
VOL. 33
THIBODAUX, Lne, SAMEDI, 20 XOVEMKBE 1897.
No 17
FEUIJjLETON
No. 9
1
I ill II 1 II h ' I '
-Par ELIE BEEÎEET. -
VIII. — LA FOIRE PF. ÊA1NT-81MEON
--- Smte
dis
Le pitre, ceinine son maître,
tribuait des petits» boîtes aux ama
teurs, et il les vantait avec un
entrain, une exagération joviale, une
bonne humeur ineoicevable. Selon
lui, la jaune avait fait repousser une
tête sur les épaules d'un mari à qui
sa femme l'avait fait perdre (la tête).
La rouge avait changé la jambe de
bois d'un invalide eu une jambe
de s'.ntir et d'o», sur laquelle sou
propriétaire pouvait se tenir debout
pendant vingt-quatre heures, sans
boire, ni manger, ni dormir. La
bleue rendait de» uhevsux et des
dent» aux vieillards les plus chanvres
et les plu» édenté». La verte avait
ressuscité de» imut» ...... Tout
cela, dit avec aplomb, faisait lire le»
uua aux éclat» cl ouvrir aux autres
des yeux étonnée. Mais les uns ei
le» autres achetaient de» petites
boîtes, et les piè es d'un frano con
tinuaient Ue tomber eu .cio-c. de non
interrompue u. u» un »at- «le cuir.
Uue circule ai.ee ne tarda pas a
porter au couib e m faveur du pubiio.
Parmi le» g«ns qui formulent de»
rangs épai-. autour de la voiture, se
trouvaieut le passeur du bac, qui
n'avait pu résister au désir da venir
voir un moment la fête, et plusieurs
personnes qui avaient failli périr
dans la rivière.
L'accident arrivé au bac était
uonnu sur le champ de foire ; lors
qu'on apprit que le docteur et son
pître étaient le» héros de cette
aventure, la sympathie qu'il» inspi
raient »'en accrut considérablement.
Tout le monda voulait les voir, et,
pour les voir, on achetait.
Le docteur Jean et son pître se
multipliaient pour distribuer les
petite» boîtes aux nombreux deman
deurs et pour en recevoir le prix.
Le docteur, toutefois, ne tarda pas
à donner des signes de préoccupa
tiou, Une élégante demoiselle et
un enfant bien mis » étaient arrêtés
à une vingtaine de pas de la voiture;
c'étaient Joséphine Jolivet et Léon.
Joséphine n'avait pu résister aux
sollicitations du petit bonhomme qui
voulait visiter les curiosités de la
foire ; elle venait d'arriver dan» un
léger cabriolet, qu'elle avait laissé à
l'entrée de la ville, sous la garde
d'un domestique. La tante et le
neveu, ayant reconnu leurs anciens
hôtes dans le charlatan et sou valet,
»'étaient approchés pour les exami
ner.
Léon désirait se mêter à la foule,
et tiraillait Joséphine qui, plu
timide et plus réservée, retenait de
toutes ses forces le petit mutin. La
vue de ce docteur Jean, quelle ren
contrait dans des circonstances si
peu ordinaires, semblait éveiller en
elle certains souvenirs. Maintenant
qu'elle pouvait se livrer sans gêne à
un examen attentif, elle taisait des
rapprochements, et son visage pâle
prenait l'expression d'une véritable
anxiété.
C' était cette observation ardente
et soutenue, qni causait le malaise
du docteur Jean. A ainement es
sayait-il d'y échapper, en se baissant
pour causer avec ses pratiques, en se
tournant à droite et à gauche . u
sentait toujours les yeux
de la jeune personue attachés
i
>.r ml. lim U u U eut un
motif pour se retirer ; le grand
cutlre et les cassette» étaient vuie-q
Ls» boîte» de toute» couleurs étaient
veudue», et il fallait retourner a
l'auberge afin de s'approvisionner
de nouveau, au moyen d uu fourgon
qui suivait le docteur dans sea
voyages.
Le charlalun annonça le fait aux
demandeurs, et promit de revenir le
lendemain.
—A demain donc ! s'écria le
pître d'une voix retentissante ; pins
risn dans les main», mais beaucoup
dans Iss poches ! .... Ceux qui
sont malades à en mourir sont priés
d attendre à dsmaiu. Ensuite, vous
savez ! s'ils meurent, avec mes
boîtes je m'en moque......demain
on Iss ressuscitera !
Des éclats de rires accueillirent
cette plaisanterie un peu lugubre, et
la foule commença à »e disperser.
Mais il y avait encore quelques
préparatifs à faire, de l'ordre à
mettre dans les bagages, si bien
qu'avant que la voiture se fût
ébranlé», Joséphine, entraînée par
Léon, se trouva près de la portière.
Le docteur Jean ne pouvait feindre
de ne pas la voir, et la salua d'un
air contraint.
—Il y a des incognitos bien diffi
ciles à garder, dit Joséphine en
souriant, surtout envers ceux à qui
'on a rendu des services ....
—Ce» services,répliqua le docteur,
non sans quelqu'impatienoe, on
agirait sagement de les oublier. Il
existe entre certaines conditions de
telles distances ....Je vous disais
bien, Mademoiselle, que mon nom
n'était ni brillant, ni recommanda
ble et peut-être eût-il été plus géné
reux de ne pas chercher à l'appren
dre.
—Le hasard a tout fait, Monsieur,
répliqua Joséphine un peu piquée,
et puis, Léon qui a reconnu scs
sauveurs ....
—Monsieur, dit le petit homme
s'apercevant qu'on s'occupait de lui,
veux-tu me prendre dans ta belle
voiture ? ____ Et mon ami Robil
lard, comme le voilà joliment habil
lé ! .... Dis donc, Robillard, laisse
moi monter sur ton dos, comme
l'autre jour ?
—J'ai un lumbago I répondit
Robillard.
Joséphine et le charlatan restaient
en face l'un de l'autre.
Le docteur se montrait de plus en
plus troublé ; Mlie Jolivet n'osait
faire des questions qui semblaient
lui venir aux lèvres.
Je vous le répète, Mademoiselle,
reprit le docteur, Il nous faut oublier
l'uu et l'autre 1« hasard qui nous a
rapprochés ; il nu saurait y avoir
rien de commun entre une riche,
pure et noble demoiselle telle que
vous, et .... un homme de ma
profession .... Adieu dcnc ! ....
Ne cherchez plu» à revoir la pauvre
docteur Jeun.
Il avait prononcé ce» dernières
paroles avec un accent dé profonde
tristesse et, eu dépit de lui-même,
ses vaux se remplissaient de larmes.
—Le docteur Jean ! répéta
Joséphine en baissant la voix ;
monsieur le docteur, n'avez vous
jamais porté un autre nom ?
—Jamais, répliqua le charlatan
d'un ton ferme, jamais ?
Il salua de la main et la voilure
»e perdit au milieu de la foule.
Joséphine demeurait toute revente
à la même place.
—C'est lui ! pensait elle ; je n'en
saurais douter à cette heure. Com.
|
m tnt
peut il ....
—Eh ! Mademoiselle, demanda
une voix doucereuse à son côté, il
me semble que vous connaissez ces
gens-li ?
Joséphine se retourna brusquement
et se trouva eu présence de Blaisot
Le teneur de livres, avec sa canne
eous le bras, avec e» grande redin
gote, avec non chapeau à latges
bord» pur dessous lequel brillaient
ses lunettes bleue», avait l'air «le
faire sa tournée ti la foire, comme les
bon» bourgeois du pays. Joséphine
eut un mouvement bien marqué de
répulsion ; néanmoins, elle répon
dit avec tranquillité :
—Tien» i c'est voua. monsieur
Blaisot ? Il eet impossible que von»
n'ayez pu«, comme moi, recousu nos
hôtes de la Forge.
—Il» sout faciles à reconnaît)e et
vous ue pouviez, eu effet, vous <ln
penser...... Ainsi, en définitive,
ces homme», qu'on a reçus comme
de» prince», mêlaient lien de plus
qu'un charlatan ot »on valet ?
—Vous le voyez bien .... Mais
pardon ! je me seus lasse, t-t je vais
retourner au château......Bonne
promenade, monsieur Biaioot,.
Et elle s'éloigna, traînant par la
main Léon, qui demandait avec ins
tance qu'on le conduisit au cirque de
Fraueoni et à "la femme à deux
têtes". Blaisot suivit du 'egard
Mlle Jolivet, et ses yeux pétillaient
comme ceux d'une vipère derrière
ses lunette».
—Toujours le même inépi is pour
moi ! murmura t-ii ; je ue suis
pourtant pas si vieux et si repoussant!
......Quand aux autres, il n'y a
décidément pas grand'ebose il crain
dre .... N'importe ! on ne saurait
prendre trop de précautions...... j
Voyons encore.
Et il se dirigea, d'un air d'indo
lence, vers l'auberge de lu Croix
d'Argent, où le charlatan cl son
monde étaient descendus.
LE MARI ET LA FEMME.
Deluzy, revenu à la Forge,
dans »on cabinet de travail, et »'oc
cupait de dépouiller la correspon
dance qui était arrivée pendant son
absence.
Bien qu'il eût dos cheveux grison
nant» et qu'il fût un peu trop chargé
d'erabsnpoint, il ne différait pas
beaucoup de ce que hou» l'avons vu
autrefois. En ce moment, daua une
habitation perdue au milieu des
montagnes, il portait un frais cos
tume taillé évidemment par un bon
faiseur. Ses doigts étaient chargés
ds bagues, et des boutons d'or fili
grané garnissaient le» manchettes et
le devant de »a chemise en foulard
blanc.
A mesura «ju'ii décachetait les
lettres entassée» sur son bureau, le
maître de forges fronçait le sourcil
grinçait de» dents et marmottait avec
colère : "Gredin ! fripon ! affreuse
canaille !____" U y avait surtout
certain papiers timbrés qui lui
causaient uue vive exaspération.
Il les froissait entre ses mains,
frappait du pied, et quoique son
impatience ne lui eût pus permis de
les déchiffrer d une manière complète,
il les rejetait loin de lui.
Enfin sa colère parut être au
comble et il se leva.
—Que le diable les emporte tous î
gronda-t-il en se promenant dans son
cabinet ; ne dira-t-ou pas d'une
bande ds loups enragés? Après
tant d'efforts pour éviter la faillite,
se voir à la veille .... C'est que
rien ne me réussit plu» !
qui avait si bien débuté à
était '
;
!
L'affaire
Londres,]
,
°
vient de tourner mal ...... Ces
anglais sont si retors, si avides !
Tout pour eux !......L'affaire de
Russie pourrait mieux marcher sans
doute ; mais cet imbécile de Blaisot
w'en finiia pas.
Ap"ès avoir fait quelques tours
dans la pièce, Il &e rassit.
— Comment me tirer «le là ?
poursuivit-il en prenant sa tâte dans
ses mains ; restent le» bien# du
vieux et de Joséphine ! Mais il y a
un conseil de tutelle, da» hommes de
loi qui, à la moindre demande, oppo
sent «le» difficultés interminables.. ..
Le vieux, dans sa folie, me hait plug
que lu mort ; Joséphine se défie, et
Victoire ne peut lien .... Comment
donc m'arranger jusqu'à ce «pie
l'affaire do Russie soit lancée ?
Ou graltt doucement à la porte ;
i! a lu ouvrir avec impatience et Mme
Deluzy cuti a.
Victoire, bleu qu'elle eût à peine
trente ans, paraissait beaucoup plus
«*t le chagrin, connue t ous
l'avoua dit, avait fuit de «-ruels
ravages sur scs trait», ja«h» si
gracieux ; elle n'était plus que
l'ombra d'elle même. Elle avait des
joues caves ; des lides »e montraient
déjà ri l'angle de »es yeux, à la
commissure de »es lèvre» ; sa che
velure noir#, autrefois si aboudaute,
était eillonuée de nombreux fils
Deluzy
blancs. En revanehe, obéissant à
un vœu de son mari, qui exigeait
d'elle l'élégance qu'il avait pour
lui-même, elle portait uu peignoir da
soie, et de gros diamants brillaieut à
ses oreilles.
Elle tenait un journal à la main
et alla »asseoir sur uu canapé)
comme »I elle »'était fatiguée à venir
de sa chambre au cabinet de M.
Ah !
demanda
humeur ;
......et
ça, que voulez-vous ?
le maître de forge avec
j'ai beaucoup d affaires
4« fort vilaines affaires,
je voua assure !
Victoire poussa uu soupir.
—Toujours ! reprit-elle : depuis
longtemps, bien longtemps, je n'en
tends que de» plaintes de ce genre
—Bon ! interrompit Deluzy, allez
vous recommencer voi jérémiade» ?
Est ne ma faute, à moi, si des évé
nements de force majeure m'ont
obligé de suspendre ma fabrication
; et de laisser improductif, depuis
! plusieurs années, un établissement
industriel de premier ordre ? Pour
couvrir ces pertes, j'ni dû recourir à
des moyens .... Enfin, ajouta-t-il
avec une colère qu'il ne prenait pas
la peine de cacher, ce n'est pas sang
doute pour causer de cela que vous
avez forcé ma porto ?
Victoire eut peine à retenir ses
larmes.
—Non, mon ami, répliqua-t-elle»
mais je viens de voir, dans le Timet,
une nouvelle qui touche une per
sonne de notre connaissance et j'ai
pensé que celte nouvelle pouvait
vous intéresser.
En même temps, elle présentait à
»on mari le journal qu elle avait à
la main.
— De qui s'agit il donc ?
— Du banquier Forster, «jue nous
avons vu si souvent à Londres,
pendant notre dernier voyage.
— Forster ! Diable ! que lui est
il arm«- ?
—On vient de l'emprisonner sous
l'accusation d'émission et peut-être
de fabrication «le fausses bank notes.
—En prison ! fausses bank-note» ?
répéta Deluzy devenant sérieux tout
à coup. Lisez-moi l'article du Times ,
Victoire, plutôt traduisez-le moi, car
vous avêz mieux l'habitude de la
! langue anglaise.
A continuer. \n\n Mrs. J. B. C. GAZZO
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